Histoires de femmes, tome 2 by Unknown

Auteur:Unknown
La langue: fra
Format: epub
Éditeur: Guy Saint-Jean Editeur
Publié: 2019-01-10T00:00:00+00:00

« Plus le temps passe et plus je m’ennuie de madame Éléonore, du manoir et de monsieur James ! Il ne faudrait surtout pas l’oublier, lui. Le matin, quand je me réveille et que je m’aperçois que je suis encore dans la grande chambre chez les parents, tout ce que j’ai envie de faire, c’est de partir en claquant la porte pour ne plus jamais revenir. Je pense que j’aurais assez de souffle et d’énergie pour courir tout au long du chemin qui mène jusqu’au manoir, tellement j’ai hâte de m’en aller. Je courrais de toutes mes forces pour arriver avant l’heure du déjeuner de la famille O’Gallagher, et comme ça, je pourrais souhaiter une bonne journée à monsieur James. Aujourd’hui, je ne me pose plus la question : je sais où est ma vraie famille, et c’est auprès de madame Éléonore. Et aussi un petit peu avec monsieur James.

En attendant, je n’ai toujours pas reçu de lettres. Ni de madame Légaré ni d’Agnès.

Pour madame Éléonore, je n’ai pas vraiment de crainte : je sais qu’elle ne m’a pas oubliée et qu’elle doit penser à moi assez souvent, sinon elle ne serait jamais venue jusqu’ici, l’autre jour, pour m’annoncer que j’étais invitée à la fête de madame Félicité.

Mais pour Agnès, par contre, c’est un peu différent... Elle doit avoir tellement plein de choses dans la tête qu’elle n’a plus de temps libre pour moi et c’est pour ça qu’elle ne m’écrit pas. Elle va à l’école, la chanceuse, et quand on a des cours, on a aussi des devoirs et des leçons. Ça doit l’occuper beaucoup. Ensuite, elle a des amies pour partager ses jours de congé. Et surtout, elle habite en ville, où elle peut aller au cinéma, au petit restaurant près de chez elle, dans les grands magasins parce que l’argent qu’elle gagne à la petite épicerie de ses parents, elle le garde pour elle et peut en faire ce qu’elle veut. Agnès a vraiment une vie comme j’aimerais avoir ! En plus, elle mange des patates frites deux fois par semaine, au moins ! Et de la crème glacée, quand il fait chaud l’été... Je n’invente rien, c’est elle-même qui m’a dit tout ça. Moi, je ne sais même pas ce que ça goûte, des patates frites ! Si jamais je retourne au manoir un jour, je vais demander à madame Éléonore de m’en faire. J’en veux toute une montagne, parce qu’Agnès m’a dit que c’était vraiment très bon. Et je veux de la crème glacée à la vanille aussi. J’aime tellement ça ! Peut-être que monsieur James et moi, on pourrait tourner la manivelle chacun notre tour jusqu’à ce que la crème soit bien prise, comme on l’a fait l’été dernier, au chalet... Est-ce qu’il pense encore à moi, monsieur James ? C’est une question que je me pose tous les soirs en m’endormant, et je me demande si Agnès a réussi à retrouver son frère, comme elle l’écrivait dans la seule lettre qu’elle m’a envoyée. J’espère parce qu’elle avait l’air vraiment inquiète quand elle parlait de Cyrille.

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